Un détail que vous n'avez peut-être même pas remarqué !
Avez-vous déjà pris le temps de regarder vos monnaies hongroises ? Vous remarquerez que la croix au sommet des armoiries penche vers la gauche et ce n'est pas un hasard, la couronne de Hongrie a elle-même la croix tordue. Les ateliers monétaires de Hongrie ont mis un point d'honneur à représenter ceci, mais alors pourquoi ? (découvrez ici nos monnaies hongroises en vente) Intéressons-nous d'abord à cette fameuse couronne (notez que cette symbolique existe aussi sur les billets hongrois que vous pouvez retrouver ici).
La couronne de Hongrie
La couronne de Hongrie est déjà considérée comme un objet saint. On la nomme également couronne de Saint-Étienne. Étienne était Duc de Hongrie et la légende raconte qu'en 1001, le duché devient un royaume suite à un édit du pape Sylvestre II. Au final, la couronne serait de facture Byzantine et offerte par Michel VII Doukas au roi Geza Ier. Bref, on ne sait pas trop. Ce qui est sûr, c'est que cette couronne a été utilisée pour le couronnement de plus de 50 rois de Hongrie jusqu'à Charles IV en 1916. Seuls trois rois seront sacrés sans :
- Joseph II
- Gabriel Bethlen
- Jean II de Hongrie
Cette couronne est un objet sacré pour les Hongrois, comme l'épée joyeuse de Charlemagne en France (nous y reviendrons dans un autre article). C'est un symbole du pouvoir divin du pays, donc quelque chose de très sérieux.
L'origine du problème de la croix
A partir de là, l'histoire se mélange beaucoup avec la fiction. Il existe plusieurs versions qui pourraient expliquer la dégradation de la croix au sommet de celle-ci :
L'usure du temps
Certains pensent que c'est simplement l'usure du temps qui a eu un impact sur la croix et, comme la couronne est un objet saint, personne n'a osé la réparer.
Une mauvaise évolution à Byzance
Moins probable selon moi, la couronne qui a subi plusieurs modifications au cours du temps et, au XIIe siècle, elle fut modifiée à Byzance sous Manuel Ier Comnène (voir nos monnaies Byzantines) et elle serait revenue tordue.
La fuite de la reine au XVIe siècle
Une des légendes les plus connues est celle-ci : en 1541, lors de la conquête de la Hongrie par les Ottomans, la reine Isabelle Jagellon, femme de Jean Ier de Hongrie, aurait à la hâte emporté la couronne pour la sauver et l’écrin trop petit pour la couronne aurait tordu la croix au sommet.
Maladresse d'un soldat
Une autre légende raconte qu'un soldat aurait trébuché et fait tomber la couronne au XVIIIe siècle, causant ainsi la torsion de la croix.
La révolution de 1848
Une autre histoire raconte que, pendant la révolution hongroise de 1848, la couronne aurait été enterrée pour la protéger et, lorsqu'elle a été exhumée, la croix était tordue. Cette théorie est sans doute la plus sourcée selon moi, cette fuite royale qui aurait dégradé le symbole de son pouvoir qu'on ne restaure pas.
Alors pourquoi ne l'a-t-on pas réparée et quelle thèse semble la plus crédible ?
Déjà, la théorie de l'usure dans le temps paraît une des plus plausibles pour moi, même s'il est étrange qu'un tel symbole n'ait pas été réparé alors que la réparation paraît simple. Pareil pour la fuite face aux Turcs, un tel symbole de pouvoir aurait été réparé. La maladresse d'un soldat paraît pour les mêmes raisons peu probable.
Il est également inconcevable que les orfèvres de Byzance aient pu faire une telle erreur et que les Hongrois ne l'aient pas réparée ensuite. Quant au fait de dire qu'il ne faut pas réparer un objet saint et que le temps a tordu la croix, cela me paraît impossible également. Pourquoi n'aurait-on pas remis cette croix droite alors que la couronne a été de nombreuses fois modifiée ? La dernière daterait de 1867 (où le fond aurait été refait).
La thèse de la révolution de 1848 me parle. Déjà, pas de représentation de cette couronne sur les monnaies avant, donc aucun moyen de savoir si la croix était droite ou inclinée. La dimension symbolique d'avoir atteint le pouvoir royal (révolution quand même) doit rester gravée symboliquement. Un attribut tel qu'une sainte couronne qui aurait été dégradé et dont on interdit la réparation est un bon message aux rois suivants que le peuple existe. Pour moi, cette thèse est cohérente.